Французский с Ги де Мопассаном. Избранные новеллы - Ирина Дегиль
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– Il faut que tu entendes tout pour comprendre. J’avais douze ans, seulement douze ans, tu te le rappelles bien, n’est-ce pas? Et j’étais gâtée, je faisais tout ce que je voulais !… Tu te rappelles bien comme on me gâtait ?… Écoute… La première fois qu’il est venu, il avait des bottes vernies; il est descendu de cheval devant le perron, et il s’est excusé sur son costume, mais il venait apporter une nouvelle à papa. Tu te le rappelles, n’est-ce pas ?…
Ne dis rien… écoute (не говори ничего, слушай). Quand je l’ai vu, j’ai été toute saisie (когда я его увидела, я была поражена; saisi – увлеченный; пораженный; saisir – хватать, схватывать; захватывать), tant je l’ai trouvé beau (он мне показался таким красивым: «таким красивым я его нашла»; trouver – находить; считать, находить), et je suis demeurée debout dans un coin du salon tout le temps qu’il a parlé (и я стояла в углу гостиной все время, что он говорил; demeurer – жить; пребывать /в каком-либо состоянии/; debout – стоя). Les enfants sont singuliers… et terribles (дети своеобразны и ужасны; singulier – единственный; своеобразный)… Oh! oui… j’en ai rêvé (ах, да, я мечтала о нем)!
Il est revenu… plusieurs fois (он вернулся … /приходил/ много раз)… je le regardais de tous mes yeux, de toute mon âme (я смотрела на него во все глаза, всей своей душой)… j’étais grande pour mon âge (я была старше своих лет: «большой для своего возраста»; grand – большой; взрослый)… et bien plus rusée qu’on ne croyait (и гораздо хитрее, чем думали). Il est revenu souvent (он часто приходил)… Je ne pensais qu’à lui (я думала только о нем). Je prononçais tout bas (я произносила совсем тихо):
– Henry… Henry de Sampierre (Анри, Анри де Сампьер)!
Ne dis rien… écoute. Quand je l’ai vu, j’ai été toute saisie, tant je l’ai trouvé beau, et je suis demeurée debout dans un coin du salon tout le temps qu’il a parlé. Les enfants sont singuliers… et terribles… Oh! oui… j’en ai rêvé !
Il est revenu… plusieurs fois… je le regardais de tous mes yeux, de toute mon âme… j’étais grande pour mon âge… et bien plus rusée qu’on ne croyait. Il est revenu souvent… Je ne pensais qu’à lui. Je prononçais tout bas :
– Henry… Henry de Sampierre !
Puis on a dit qu’il allait t’épouser (потом сказали, что он собирается на тебе жениться). Ce fut un chagrin (/для меня/ это было горе)… oh! grande sœur… un chagrin… un chagrin (ох, моя старшая сестра, горе, горе)! J’ai pleuré trois nuits, sans dormir (я проплакала три ночи без сна; dormir – спать). Il revenait tous les jours, l’après-midi, après son déjeuner (он приходил каждый день во второй половине дня, позавтракав: «после своего завтрака»; revenir – возвращаться, снова приходить; après-midi, m – вторая половина дня, время после полудня; midi, m – полдень)… tu te le rappelles, n’est-ce pas (ты помнишь, не так ли)! Ne dis rien… écoute (не говори ничего, слушай). Tu lui faisais des gâteaux qu’il aimait beaucoup (ты готовила ему пирожные, которые он очень любил; gâteau, m)… avec de la farine, du beurre et du lait (из муки, сливочного масла и молока)… Oh! je sais bien comment (о, я тоже умела их готовить: «я тоже знаю как»)… J’en ferais encore s’il le fallait (я бы и сейчас приготовила их, если бы понадобилось). Il les avalait d’une seule bouchée (он проглатывал их целиком; bouchée, f – количество пищи, принимаемое за один раз, кусок), et puis il buvait un verre de vin (потом он выпивал стакан вина; boire)… et puis il disait: « C’est délicieux (а потом он говорил: «Вкусно»). » Tu te rappelles comme il disait ça (ты помнишь, как он говорил это)?
Puis on a dit qu’il allait t’épouser. Ce fut un chagrin… oh! grande sœur… un chagrin… un chagrin! J’ai pleuré trois nuits, sans dormir. Il revenait tous les jours, l’après-midi, après son déjeuner… tu te le rappelles, n’est-ce pas! Ne dis rien… écoute. Tu lui faisais des gâteaux qu’il aimait beaucoup… avec de la farine, du beurre et du lait… Oh! je sais bien comment… J’en ferais encore s’il le fallait. Il les avalait d’une seule bouchée, et puis il buvait un verre de vin… et puis il disait: « C’est délicieux. » Tu te rappelles comme il disait ça ?
J’étais jalouse, jalouse (я ревновала, ревновала; jaloux – завистливый; ревнивый)!… Le moment de ton mariage approchait (время: «момент» твоей свадьбы приближалось). Il n’y avait plus que quinze jours (оставалось всего пятнадцать дней = две недели). Je devenais folle (я сходила с ума: «становилась безумной»; devenir). Je me disais (я говорила себе): Il n’épousera pas Suzanne, non, je ne veux pas (он не женится на Сюзанне, нет, я не хочу этого)!… C’est moi qu’il épousera, quand je serai grande (он женится на мне, когда я вырасту: «буду взрослой»; grand – большой; взрослый). Jamais je n’en trouverai un que j’aime autant (я никогда не найду кого-то другого, которого буду так же любить)… Mais un soir, dix jours avant ton contrat (но как-то вечером, за десять дней до твоей свадьбы), tu t’es promenée avec lui devant le château, au clair de lune (ты гуляла с ним перед замком при свете луны; lune, f)… et là-bas… sous le sapin, sous le grand sapin… il t’a embrassée (и там, под елью, под большой елью он поцеловал тебя)… embrassée… dans ses deux bras… si longtemps (целовал, /заключив/ в объятия, так долго)… Tu te le rappelles, n’est-ce pas (ты это помнишь, не так ли)! C’était probablement la première fois… oui (это, вероятно, было в первый раз… да)… Tu étais si pâle en rentrant au salon (ты была так бледна, когда вернулась в гостиную)!
J’étais jalouse, jalouse !… Le moment de ton mariage approchait. Il n’y avait plus que quinze jours. Je devenais folle. Je me disais: Il n’épousera pas Suzanne, non, je ne veux pas !… C’est moi qu’il épousera, quand je serai grande. Jamais je n’en trouverai un que j’aime autant… Mais un soir, dix jours avant ton contrat, tu t’es promenée avec lui devant le château, au clair de lune… et là-bas… sous le sapin, sous le grand sapin… il t’a embrassée… embrassée… dans ses deux bras… si longtemps… Tu te le rappelles, n’est-ce pas! C’était probablement la première fois… oui… Tu étais si pâle en rentrant au salon !
Je vous ai vus (я вас видела); j’étais là, dans le massif (я была там, в цветнике; massif, m – горный массив; цветник). J’ai eu une rage (я была в ярости; rage, f – бешенство; ярость)! Si j’avais pu, je vous aurais tués (если бы я могла, я бы убила вас /тогда/)!
Je me suis dit (я сказала себе): Il n’épousera pas Suzanne, jamais (он не женится на Сюзанне, никогда)! Il n’épousera personne (он ни на ком не женится). Je serais trop malheureuse (я была бы слишком несчастной)… Et tout d’un coup je me suis mise à le haïr affreusement (и вдруг я стала его ужасно ненавидеть).
Alors, sais-tu ce que j’ai fait (тогда, знаешь, что я сделала)?… écoute (послушай). J’avais vu le jardinier préparer des boulettes (я видела, как садовник готовит котлеты; boulette, f – шарик; котлета) pour tuer des chiens errants (чтобы убить бродячих собак; errer – блуждать; бродить). Il écrasait une bouteille avec une pierre (он измельчал бутылку камнем; écraser – давить; измельчать) et mettait le verre pilé dans une boulette de viande (и клал толченое стекло в мясную котлету; piler – толочь, растирать).
Je vous ai vus; j’étais là, dans le massif. J’ai eu une rage! Si j’avais pu, je vous aurais tués !
Je me suis dit: Il n’épousera pas Suzanne, jamais! Il n’épousera personne. Je serais trop malheureuse… Et tout d’un coup je me suis mise à le haïr affreusement.
Alors, sais-tu ce que j’ai fait ?… écoute. J’avais vu le jardinier préparer des boulettes pour tuer des chiens errants. Il écrasait une bouteille avec une pierre et mettait le verre pilé dans une boulette de viande.
J’ai pris chez maman une petite bouteille de pharmacien (я взяла у мамы маленькую аптекарскую склянку; bouteille, f – бутылка; склянка; pharmacien, m – аптекарь; pharmacie, f – аптека), je l’ai broyée avec un marteau (истолкла ее молотком), et j’ai caché le verre dans ma poche (и спрятала стекло в кармане). C’était une poudre brillante (это был блестящий порошок; briller – блестеть)… Le lendemain, comme tu venais de faire les petits gâteaux (на следующий день, когда ты только что приготовила пирожные), je les ai fendus avec un couteau et j’ai mis le verre dedans (я разрезала их ножом и положила стекло внутрь; fendre – раскалывать; разрезать)… Il en a mangé trois (он съел три пирожных)… moi aussi, j’en ai mangé un (я тоже, я съела одно)… J’ai jeté les six autres dans l’étang (я выбросила остальные шесть в пруд; étang, m)… les deux cygnes sont morts trois jours après (два лебедя умерли три дня спустя)… Tu te le rappelles (помнишь)?… Oh! ne dis rien… écoute, écoute (о, не говори ничего, слушай, слушай)…
J’ai pris chez maman une petite bouteille de pharmacien, je l’ai broyée avec un marteau, et j’ai caché le verre dans ma poche. C’était une poudre brillante… Le lendemain, comme tu venais de faire les petits gâteaux, je les ai fendus avec un couteau et j’ai mis le verre dedans… Il en a mangé trois… moi aussi, j’en ai mangé un… J’ai jeté les six autres dans l’étang… les deux cygnes sont morts trois jours après… Tu te le rappelles ?… Oh! ne dis rien… écoute, écoute…
Moi seule, je ne suis pas morte (одна я не умерла)… mais j’ai toujours été malade (но я всегда болела: «была больной»)… écoute (слушай)… Il est mort (он умер)… tu sais bien (ты знаешь)… écoute… ce n’est rien cela (слушай… это не важно)… C’est après, plus tard… toujours… le plus terrible (это после, позже, как всегда… самое страшное)… écoute (слушай)…
Ma vie, toute ma vie… quelle torture (моя жизнь, вся моя жизнь, какая это была мука; torture, f – пытка; мука; torturer – пытать, мучить)! Je me suis dit (я сказала себе): Je ne quitterai plus ma sœur (я больше не оставлю сестру). Et je lui dirai tout, au moment de mourir (и я скажу ей все в тот момент, как буду умирать)… Voilà (вот). Et depuis, j’ai toujours pensé à ce moment-là (и с тех пор я всегда думала об этом моменте), à ce moment-là où je te dirais tout (о моменте, когда я тебе все расскажу)… Le voici venu (вот он пришел)… C’est terrible (это ужасно)… Oh !… grande sœur (о, моя старшая сестра)!
Moi seule, je ne suis pas morte… mais j’ai toujours été malade… écoute… Il est mort… tu sais bien… écoute… ce n’est rien cela… C’est après, plus tard… toujours… le plus terrible… écoute…
Ma vie, toute ma vie… quelle torture! Je me suis dit: Je ne quitterai plus ma sœur. Et je lui dirai tout, au moment de mourir… Voilà. Et depuis, j’ai toujours pensé à ce moment-là, à ce moment-là où je te dirais tout… Le voici venu… C’est terrible… Oh !… grande sœur !